Chronique littéraire – Décembre 2025

Aujourd’hui :
La révolte des cigarières de Fanny Vaucher et Eric Burand. – Antipodes, 2025.
Femmes révoltées et lutte des classes à Yverdon
Après leurs chroniques très réussies de la vie sociale en Suisse au XIXe (La vie de Jeanne) et XXe siècle (La vie d’Emma), le scénariste Éric Burnand et la dessinatrice Fanny Vaucher nous transportent cette fois à Yverdon, pas encore affublée de sa particule « Les Bains ». Nous sommes au début des années 1900, période qualifiée de « Belle Époque » et caractérisée par ses progrès techniques et économiques fulgurants. Un âge d’or ne profitant toutefois pas à tout le monde de la même manière. Dans les usines des frères Vautier, fleuron de l’industrie du tabac depuis 1831 à Grandson puis à Yverdon, plus de 500 « petites mains » confectionnent cigares et cigarettes dans des conditions plus que précaires. On y embauche une majorité de jeunes ouvrières non qualifiées, exploitées sans vergogne 11 heures par jour pour un salaire de misère et dans des conditions d’hygiène déplorables. Un petit défaut remarqué sur un cigare, une baisse de régime due à l’épuisement ou simplement une remarque à peine exprimée, voilà que le contremaître applique « l’amende », une punition pécuniaire prélevée sur des salaires déjà rachitiques. Même le très rigoureux « Inspecteur fédéral des fabriques » s’offusque de ces mesures jugées « trop arbitraires ».
C’est alors que naît la révolte des cigarières. Conseillée par une dirigeante syndicale venue de Berne, la jeune ouvrière Lucie Zingre, encourage progressivement ses camarades à se rebeller et organise, au printemps 1907, la première grève syndicale entièrement féminine. Sous le joug patriarcal d’une famille industrielle dépassée, soutenue par des autorités communales et cantonales complices, le combat sera rude et inégal. Mais le mouvement social finira par porter ses fruits et la défense des ouvrières et ouvriers saura s’organiser de manière pérenne. Dans ce troisième opus, Éric Burnand et Fanny Vaucher réhabilitent avec justesse la mémoire de Lucie Zingre et de la poignée de « meneuses exaltées » dont le courage et la détermination ont sauvé de l’exploitation des milliers de « petites gens », chez nous, en bonne terre vaudoise, il y a seulement quatre ou cinq générations.
François Chevalier
La Librairie de Poche
Tous les livres présentés dans cette chronique littéraire mensuelle sont disponibles à la Médiathèque de la Vallée de Joux et à la Librairie de poche.
www.lalibrairiedepoche.ch
Les vendredis 5 et 19 décembre
entre 14h et 18h30 (selon état des routes)
devant le Temple du Sentier
www.mediathequelavallee.ch
Mercredi : 13h30 - 17h00
Jeudi : 16h00 - 18h30
Vendredi : 15h30 - 18h00
Samedi : 09h30 - 12h00
Fermé du 20 décembre au 4 janvier