Histoire : Du pétrole dans le Risoud – 3e partie

Pétrole Risoud  – FAVJ du 15 mars 1961

Nous avons assisté aux premiers espoirs et aux derniers renoncements. Malgré les soins diligents, empressés de tous les spécialistes en la matière, malgré les sondages pour l’appeler à la vie, il n’a pas été possible d’extraire à la surface le dieu pétrole, le faire vivre, allumer le flambeau de la victoire avec toutes ses illusions; non, hélas, le précieux or noir est resté dans les profondeurs, les chirurgiens ont renoncé, à bout de souffle, usant leurs instruments sur un silex invulnérable.

Après un sondage laborieux, une piqûre intramusculaire de 2000 mètres environ, le Risoud a gardé son mystère, le Risoud a gardé son secret, le Risoud reste une énigme. Ses profondeurs hélas ne sont pas rentables. Seule sa surface représente une véritable richesse soigneusement entretenue et renouvelée par les soins diligents des humains et ses hautes futaies, aux dires de quelques initiés (voir les récits des contrebandiers du Risoud), peuvent à certaines époques apporter quelques avantages à ceux qui, habiles coursiers, osent se permettre de déjouer les embuscades de notre vénérable administration douanière.

Que penser, que dire ? Faut-il déplorer ou se réjouir ? Que donnerait un Gallup dans notre Vallée si les résultats de l’activité méritoire entreprise par la Prépa (Société de recherches pétrolières) avaient été positifs ?

Nous publierions volontiers les points de vue de nos lecteurs à ce sujet si quelques personnes autorisées tiennent à l’exprimer !

Personnellement, tout en regrettant qu’un effort accompli dans des conditions aussi extraordinaires de difficultés n’ait pas trouvé sa récompense, nous devons constater qu’il a été une victoire sur les forces de la nature. Maintenir une route trafiquable en hiver avec des chutes de 1 m 50 à 2 mètres de neige pour assurer un ravitaillement en eau, jour et nuit, représentant 1600 voyages de 14 km avec 7 m3 et assurer la relève des trois équipes du personnel, constituent à eux seuls des exploits auxquels il convient de rendre hommage.

Le mérite en revient à l’A.V.J. qui avait endossé cette lourde responsabilité et a pu la mener à bonne fin grâce à la collaboration des entreprises Bolomey, Carlin et Aubert D. pour la relève du personnel. Ainsi donc, selon renseignements officieux, les renseignements officiels étant impossibles à obtenir, l’entreprise a désormais cessé son activité.

La forêt reprendra ses droits, le silence petit à petit régnera dans ces lieux troublés pendant quelques mois par le vrombissement des compresseurs à mazout. L’imposant matériel installé à grands frais émigrera en d’autres lieux, espérons, plus propices et lentement, selon les rites inexorables, la nature pansera ses plaies. Dans quelques années les amateurs de petits fruits viendront, seuls bénéficiaires, récolter les résultats tangibles de cette expérience historique.

R.D.

 

Autour du pétrole – FAVJ du 15 mars 1961

On n’a pas fini de parler du pétrole. Le commun des mortels croit que c’est une substance telle que le seul fait de posséder une source donne immédiatement la richesse. C’est en partie vrai pour les gisements d’Arabie où la nappe de précieux liquide se trouve peu profonde et où les frais de forage sont minimes. La situation se présente différemment dans un grand nombre d’autres cas. Ainsi en Suisse, il serait curieux de voir tous les capitaux qui ont déjà été engloutis dans les travaux de prospection, depuis les premiers forages de Cuarny où la flamme de l’espoir était pourtant allumée, à celui du Chalet Capt. Dans ce dernier cas, les seuls bénéficiaires sont ceux qui y travaillent et y trouvent une source de revenus appréciable. Mais il ne faut pas oublier que le premier litre qui arrivera à la surface aura une valeur inestimable et qu’il faudra un nombre respectable de mètres cubes pour amortir décemment les capitaux engagés.

Dans les reportages qui sont consacrés aux découvertes nouvelles, on ne parle guère des frais. Ils sont énormes. Une compagnie, par exemple, qui prospecte en plein continent, doit faire face à des frais considérables.

On compte que le prix moyen d’un forage dans le Grand Erg oriental coûte six millions de francs. S’il s’agit de recherches, le géologue coûte une vingtaine de mille francs par an et une équipe sismique quatre cent mille francs. Une sonde puissante coûte la bagatelle de dix millions, son fonctionnement environ cinq cent mille francs par mois.

De plus, aujourd’hui, la production de pétrole est excédentaire ! On assiste à une lutte des prix depuis l’apparition du pétrole soviétique sur les marchés. La compagnie italienne Nenni a fait dernièrement un contrat avec Moscou et échangera des tubes d’acier contre le fameux liquide. Déjà les grandes compagnies ont dû baisser leurs prix, sans que le consommateur en ait bénéficié, bien entendu, les douanes sont là pour profiter, elles aussi, de toutes les occasions pour tirer le plus de profit possible.

On sait maintenant que la France n’est pas absolument sûre de garder pour elle le pétrole du Sahara. Le gouvernement provisoire a déclaré sans ambages que le désert faisait partie intégrante de l’Algérie. Du reste, les Libyens ont tiré profit de la découverte de l’or noir par les Français, et on croit savoir que les réserves libyennes sont plus importantes encore que celles qui sont actuellement exploitées par les sociétés françaises. Elles sont aussi plus près de la côte, donc plus facilement accessibles. Des concessions ont été accordées à de nombreuses sociétés parmi lesquelles les Américains sont en première place.

R.D.

Texte fourni par M. Rémy Rochat des Charbonnières et M. Daniel Aubert du Brassus.
Photo: M. Devaud, Le Solliat

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